Collégiale Saint-Pierre de Chauvigny

Les chroniques de mon blog rendent compte des monuments et des artistes que je « rencontre » lors de mes périples. L’église Saint-Pierre de Chauvigny fut un réel coup de cœur, l’une de mes pépites.

Histoire de la construction

25 kilomètres séparent Chauvigny de Poitiers, c’est ainsi que les Évêques de Poitiers choisirent sans doute ce lieu pour y bâtir un premier château, remplacé au XIIème siècle par un édifice en pierre dont les ruines dominent toujours la petite cité.

Les recherchent faites mentionnent pour la première fois une église en l’an 1025. Elle est désignée collégiale du fait de plusieurs mentions du XIème siècles qui indiquent qu’un chapitre de dix chanoines y existait.

L’on peut évoquer avec certitude que l’église fût construite au XIIème siècle et que son clocher fût terminé au XIIIème siècle.

Collégiale Saint-Pierre, Chauvigny

Collégiale Saint-Pierre, Chauvigny

Le roman passant, une grande baie aux caractéristiques gothique fut percée dans l’axe. Au cours des Guerres de Religion, les troupes de l’amiral de Coligny incendient l’église. Partiellement incendiée, elle est rénovée à partir de 1573. Lors des évènements de la Fronde, elle est à nouveau endommagée par les troupes du marquis de la Roche-Posay, des réparations auront et des peintures murales y seront réalisées. En 1801, le clocher subit la foudre, il sera consolidé en 1809.La visite de Prosper Mérimée permet qu’une grande campagne de restauration de l’édifice soit effectuée à partir de 1849. Les peintures actuelles datent de 1856, l’idée n’était pas de créer un monde médiéval mais simplement de rappeler que les églises romanes étaient le plus souvent peintes.

Architecture

Longue de 45 mètres, cette église adopte un plan en croix latine avec une nef centrale recouverte d’une voûte.

Le visiteur pourra remarquer une nef divisée en trois parties : le vaisseau central avec une voûte en berceau brisé soutenue par cinq travées aux chapiteaux décorés de formes géométriques et de chaque côté, de ce vaisseau principal, des collatéraux aux voûtes d’arrêtes.

La croisée du transept est faite de quatre piliers carrés flanqués de demi-colonnes sur lesquels repose une coupole octogonale.

Cette croisée sert de support au clocher du XIIème siècle de plan carré, comportant trois niveaux, le dernier accueillant les cloches de l’édifice.

La partie la plus ouvragée est sans conteste le chœur daté du début du XIIème siècle. Il se compose d’une abside développée de sept arcades supportées par six colonnes aux chapiteaux très ouvragés et les deux piliers de la croisée. L’on trouve également dans le chœur trois absidioles, chapelles de petites dimensions.

Absidiole, Collégiale Saint-Pierre, Chauvigny

Absidiole, Collégiale Saint-Pierre, Chauvigny

De l’extérieur, le plan de l’église est clairement marqué et permet d’identifier avec aisance les différentes parties de l’édifice. Le chevet est particulièrement remarquable quant à son style roman, ses arcades en parties basses et ses toitures cachées par des murets qui signalent une volonté artistique.

Chevet, Collégiale Saint-Pierre, Chauvigny

Chevet, Collégiale Saint-Pierre, Chauvigny

Décor intérieur

L’œil du visiteur sera stupéfait par la richesse des peintures du décor intérieur. Réalisées au XIXème siècle, elles ont pour objet de mettre en valeur les éléments architecturaux et de rappeler au visiteur que l’intérieur des églises romanes étaient souvent ornées de couleurs. Rappelons qu’au XIIème siècle, les fidèles sont majoritairement illettrés et qu’ainsi l’iconographie présente dans l’intérieur de l’édifice religieux est le seul moyen d’avoir accès au récit biblique sans l’aide d’un prêtre, elle revêt donc une importance de premier plan.

Dans la majeure partie de l’intérieur, l’on retrouve un fond blanc marqué de rehaussement de couleur rouge, bordeaux et orange soulignant l’architecture des différentes parties de l’édifice.

Intérieur, Collégiale Saint-Pierre, Chauvigny

Intérieur, Collégiale Saint-Pierre, Chauvigny

Le « trésor » de cette église est sans conteste ses chapiteaux de l’abside. Allons plus en avant sur les chapiteaux de gauche à droite.

Le premier chapiteau représente Satan et ses fidèles : au centre Satan au-dessus d’un brasier tient entre ses dents ce qui pourrait être la pierre d’un autel profané ; autour de Satan, des démons aux têtes hideuses triomphent de leurs proies.

Chapiteau roman, Collégiale Saint-Pierre, Chauvigny

Chapiteau roman, Collégiale Saint-Pierre, Chauvigny

Le second représente des Sphinx aux corps de lions, aux gracieux mouvements.

Chapiteau roman, Collégiale Saint-Pierre, Chauvigny

Chapiteau roman, Collégiale Saint-Pierre, Chauvigny

Le troisième chapiteau tend à représenter plusieurs scènes : un légendaire dragon ailé ; des lions adossés qui semblent être des gardiens ; des sirènes-oiseaux et un danseur.

Chapiteau roman, Collégiale Saint-Pierre, Chauvigny

Chapiteau roman, Collégiale Saint-Pierre, Chauvigny

Reprenant la thématique animalière et légendaire, le quatrième chapiteau représente quatre lions ailés s’affrontant.

Le cinquième chapiteau est sans doute le plus clair car représentant des scènes bibliques, à savoir : l’Annonciation, l’ange Gabriel annonce à la Vierge Marie qu’elle portera le fils de Dieu (Marie est représentée tenant Jésus sur ses genou, l’Étoile du Berger sur la gauche et la Main de dieu sur la droite et au-dessus l’inscription « Godfridus me fecit », Godefroy m’a fait, évocation du sculpteur) ; l’Adoration des Mages, épisode fondamental qui indique la reconnaissance de Jésus Christ par des personnes importantes ; la Présentation au Temple et la Tentation de Jésus au Désert.

Chapiteau roman, Collégiale Saint-Pierre, Chauvigny

Chapiteau roman, Collégiale Saint-Pierre, Chauvigny

Le chapiteau suivant, le sixième, où l’on identifie des dragons qui s’affrontent, figure de l’âme des défunts qui se battent pour trouver le Ciel.

Non moins important, le septième des chapiteaux porte sur le Jugement : thème primordial dans la religion chrétienne il présente la Grande Prostituée de Babylone ; Babylone abandonnée, le deuil de la grande cité ; le Pèsement des âmes pour leur accession au Paradis ou la relégation aux Enfers et l’annonce aux Bergers, l’ange Gabriel porte la parole de dieu (Dixit gloria in excelsis deo).

Chapiteau roman, Collégiale Saint-Pierre, Chauvigny

Chapiteau roman, Collégiale Saint-Pierre, Chauvigny

Le dernier chapiteau présente des oiseaux dévorateurs, éléments de bestiaires ou morales humaines ?

Le fil rouge de ses chapiteaux reste la quête du Salut, au travers d’un bestiaire présentant les péchés de façon détournée et simple, mais également l’émergence de Jésus Christ venant apporter un espoir aux pêcheurs. Si ce précieux art peut être vu comme naïf, il est très représentatif de la pensée de la France médiéval et de la domination du Clergé sur ses fidèles.