Le vitrail est avant tout une histoire formidable de découvertes, de techniques et de savoirs-faire. Cet art va être mis au service des puissants pour se mettre en scène dans un récit admiré, mais va surtout servir à l’Église qui va faire usage du vitrail pour enseigner les fidèles n’ayant pas l’instruction nécessaire pour lire la Bible.
Nevers et ses vitraux
La cité de Nevers voit s’élever sa cathédrale entre les Xème et XVIème siècle. Élégante et surprenante, la cathédrale de Nevers subit les affres de la seconde guerre mondiale : des bombes alliées vont la frapper dans la nuit du 15 au 16 juin 1944. Les vitraux sont les premières victimes des bombes … L’édifice est déblayé, l’on découvre le Baptistère Saint-Jean … L’édifice sera reconstruit à l’identique à partir de 1946 à l’exception de ses vitraux. 1052 m2 de verrières vont donc être crées, 130 baies qui vont devenir le plus grand ensemble contemporain d’Europe. Plusieurs artistes vont y participer dont Jean-Michel Alberola qui va créer les vitraux du déambulatoire, vitraux qui seront réalisé par Dominique Duchemin. Les vitraux d’Alberola répondent à la « vocation » première des vitraux de raconter l’histoire biblique. Dans le même temps, Claude Viallat crée des haricots ou des éponges pour habiller les fenêtres hautes du chœur gothique de la cathédrale.

Les vitraux s’ouvrent à la découverte dans la suite de cette chronique mais il semble impérieux d’aller les voir au sein de leur bel écrin, à Nevers. Pour une meilleure compréhension, j’ai remis les vitraux dans « l’ordre biblique ».
L’Ancien Testament
Le vitrail de la Création ouvre cet ensemble formidable. Le Livre de la Genèse renseigne sur la Création : Dieu installe la lumière, que l’on retrouve avec le bandeau jaune, les premiers animaux dans un bestiaire ainsi qu’une figure du Christ inspirée d’un vitrail du XIIIème siècle.

Le récit se poursuit avec Adam et Ève. Au sein du Jardin d’Éden, l’Homme est créé près de l’arbre de la connaissance avec l’interdiction de le toucher. Plus tard, Ève sera créée. Viendront ensuite la tentation du serpent, la dégustation du fruit défendu et la Sentence contre l’humanité condamné dans le pêché. L’encadrement marron prévaut les arbres tandis que les couleurs symbolisent la végétation et les différents animaux.

Le dernier vitrail posé dans la cathédrale, en avril 2009, reprend une thématique importante de la Bible : l’Arche de Noé. Alors que le Déluge est imminent, Noé qui est un homme bon et juste va créer une embarcation pour sauver les animaux de la Création : la fameuse Arche que l’on retrouve en haut à droite du vitrail. L’Arche symbolise une sorte d’alliance entre Dieu et l’humanité reprise dans le bas du vitrail par une sorte d’arc-en-ciel.

La Bible n’est pas exclusivement un texte de paix, la violence y trouve sa part. Le vitrail suivant évoque le Sacrifice d’Isaac. Dieu va éprouver la foi d’Abraham en lui demandant de sacrifier son fils unique, Isaac. Isaac sera sauvé par Dieu en récompense de son obéissance, cette scène sera souvent reprise dans l’iconographie chrétienne pour intimer aux fidèles de se soumettre à l’autorité divine représentée par l’Église. Une sorte de rayon ardent de lumière tenu par deux mains va signifier la confiance.

Alberola poursuit son récit avec le Livre de l’Exode. L’épisode de Moïse et le Buisson Ardant y trouve sa place. Après avoir tué un Égyptien, Moïse a été chassé par le Pharaon. Moïse deviendra berger, la Providence va le mener vers un buisson qui ne se consume pas. Le feu ici ne brûle pas mais s’apparente à une manifestation d’un Dieu éblouissant. Dieu va lui confier une mission d’importance : sauver les fils d’Israël d’Égypte.

Les Hébreux, esclaves des Pharaon, vont suivre Moïse vers une nouvelle terre de liberté. Alors qu’ils sont rassemblés près de la Mer Rouge, les troupes égyptiennes s’approche pour les anéantir ou tout du moins les faire revenir à leur position d’obéissance mais Dieu leur apporte son aide au travers de Moïs qui ouvre la mer en deux. Le Passage de la Mer Rouge est un épisode important de la Bible par les couleurs du vitrail d’Alberola. La Main de Dieu se porte avec sa lumière vers le peuple Hébreux auquel il tend sa lumière en ouvrant la mer Rouge. A l’autre extrémité, la couleur rouge symbolise sans doute la peur et la possible effusion de sang que les troupes du Pharaon peuvent apporter dans leur sillage.

Au travers de l’Ancien Testament, l’on assiste à une création celle de l’histoire de l’humanité que doit posséder et transmettre une Église qui se crée sur ses mêmes bases. Le vitrail de l’Église en construction implique nombre de référence à l’Ancien Testament par exemple la couleur des pierres qui est la même que celle des corps d’Adam et Ève. Plus haut, l’on peut voir deux mains qui tiennent les enseignements de la Bible qui sont les fondements de l’Église.

Le Nouveau Testament

Le Nouveau-Testament raconte la vie de Jésus et son lien avec ses disciples. Jésus Christ est l’un des fondements de la religion chrétienne. Le vitrail de la Visitation nous présente deux futures mères, deux sœurs : Marie, enceinte de Jésus, et Élisabeth, enceinte de Jean le Baptiste. L’affection de Marie pour sa sœur se retrouve dans la chaleur de sa main posée sur l’épaule de sa sœur.

L’Annonciation est également un évènement d’importance pour les chrétiens : le Ciel demande à Marie d’être la mère du Sauveur. En effet, la colombe symbolisant l’Esprit-Saint est placé au-dessus de Marie dont la couleur du visage et le rouge l’entourant met en valeur. N’oublions pas l’Ange Gabriel sur la gauche qui transmet son message et pointe de son index le Ciel.

L’une des scènes les plus importantes pour les chrétiens est ici représenté : la Nativité. L’artiste fait montre de son talent en jouant avec les couleurs pour mettre en relief la Vierge, l’Enfant, l’âne et le bœuf. La Vierge et l’Enfant laissent dans leur posture l’idée d’une icône, s’y ajoutant une certaine tendresse.

Le vitrail suivant évoque est un des sacrements chrétiens : le Baptême. En effet, l’on peut voir une coquille Saint Jacques, le symbole du baptême, de la renaissance dans la foi chrétienne. Des mains de Jean le Baptiste, l’on peut voir couler l’eau symbolisant la vie.

La Vierge Marie présente son fils Jésus au Temple, en application de la Loi de Moïse qui implique que tout premier-né doit se consacrer à Dieu et ses parents rachète se premier-né. Dans une idée de purification, Marie offrira deux colombes.

Parmi les thèmes populaires dans l’iconographie, la Descente de Croix prend une place importante. La croix est représentée en lignes violettes tandis que l’échelle est nettement représentée. La figure du Christ apparaît dans une teinte grise.

L’Esprit Saint est également représenté par la Pentecôte : le don de l’Esprit Saint aux apôtres. Les langues de feu représentent ce don. Les apôtres y sont tous représentés et Pierre, le bâtisseur de l’Église, occupe la place centrale. Vivant et complexe dans le jeu des couleurs, la scène est représentée avec finesse, remarquons notamment les auréoles autour de chacun des apôtres.

La chapelle des Mystères Joyeux de la cathédrale de Nevers accueille Saint Gervais et Saint Protais. Les deux saints sont les anciens protecteurs de la cathédrale mais sont surtout des jumeaux du Ier siècle qui subirent le martyr pour avoir refusé de renoncer à leur culte.

La Nouveau-Testament est le recueil des Évangiles. L’un des auteurs du récit de la vie de Jésus, l’un des apôtres, Mathieu, est figuré parmi les vitraux d’Alberola.

La Mère du Christ occupe une place prépondérante dans la religion chrétienne, c’est pourquoi l’artiste a représenté le Couronnement de la Vierge. Couronnée de la main de son fils Jésus christ, Marie s’incline et joint ses mains en prière. La dominante rouge carmin rappelle le sang du Christ, tandis que sa main rappelle celle de Dieu.
Œuvre d’art à part entière de par ses différents styles architecturaux, la cathédrale est rehaussée dans sa superbe et son prestige par les vitraux de Jean-Michel Alberola. Son œuvre apporte une forme de continuité dans le temps de l’apport de l’art dans le monument religieux central de la cité de Nevers.
