Le vitrail est un élément de notre patrimoine qui a ma faveur. Si le regard est attiré par le vitrail en connaissons-nous pour autant l’origine et l’aventure ?
L’origine du vitrail
Le vitrail, c’est avant tout un mot, un dérivé de vitre. De façon plus générale, l’on peut définir le vitrail comme un assemblage de verres colorés, parfois dessinés, maintenus ensemble par une armature de plomb.
Rien n’aurait été possible sans l’existence du verre qui est la base du vitrail. L’on a pu découvrir en Égypte des objets utilisant le verre daté de 3 500 avant JC. La route sera longue pour en arriver au célèbre Crystal de Venise du verrier Murano, rendu possible par la technique du soufflage du verre qui nous vient du Ier siècle de notre ère, mise au point par les Phéniciens.
Auparavant, on utilise des châssis de bois auxquels sont apposés des toiles, papiers huilés ou encore plaque de bois, qui vont limiter la pénétration de la lumière et isoler la pièce du froid ou des grandes chaleurs … avec le verre l’on redécouvre la lumière et l’idée de décorer l’habitat viendra par la suite. Il manque encore au verre sa couleur, on utilisera de l’oxyde métallique : le cobalt pour le bleu, le cuivre pour le rouge, le fer pour le vert, …
Dès lors, le vitrail implique plusieurs corps de métiers et plus qu’une décoration c’est une œuvre d’art qui sera admirée et qui sera un objet de communication, notamment dans les bâtiments religieux mais l’on peut également y raconter l’histoire des souverains ou de personnages historiques, comme Jeanne d’Arc.
Vitrail de Jeanne d’Arc délivrant Orléans (XIXème siècle), Église Saint Antoine de Compiègne
De fait, tout au long de l’Histoire, le vitrail aura une utilité précise : décorative (motifs géométriques), religieuse (raconter la vie des Saints ou des passages de la Bible) ou encore figurée (représentation de personnages de la chrétienté qui sont associés à la religion ou aux États).
Le vitrail « au service » de la chrétienté
Des exemples de vitres colorées ou de vitraux ont été trouvés lors de fouilles : Rome, Byzance et Ravenne semblent avoir utilisés le vitrail.
Cependant, l’on peut évoquer l’époque romane comme celle qui va vraiment être à la base du « succès » du vitrail. Rappelons que l’époque romane est la première partie du moyen-âge, que l’on peut situer début au XIème siècle.
Vitrail roman de Marie et de Jésus (1130), Abbatiale de Vendôme
A cette époque, l’Église est toute puissante et ancrée dans une pratique religieuse profonde et sans contestation. Malgré tout, les grands textes, tels la Bible ou les Évangiles, sont couchés dans des textes en latin, or le peuple n’est pas éduqué à la lecture et encore moins aux subtilités du latin. Dès lors, il est concevable que l’on puisse chercher une autre manière de répandre la parole sacrée et les exemples de Sainteté que veut répandre l’Église dans toute la chrétienté.
A la fin du XIème siècle, Théophile Presbyter participe à la rédaction d’un traité sur les arts (Schedula diversarum artium), il y traite de ce qu’il nomme l’art du vitrail. Dans ce traité, il évoque que le vitrail est la superposition de « vitres » de couleurs différentes pour arriver au rendu … c’est ici une pratique très archaïque du vitrail surtout répandu au sein du Saint Empire Germanique de l’époque romane.
Revenons en France, sous la dynastie capétienne, où le vitrail est le prémice fait par l’Église à la populace. Les premiers ateliers de vitrailliste sont fondés à Chartres.
La cathédrale de Chartres est l’un des plus beaux témoins des vitraux de l’époque médiéval, notamment Notre-Dame-de-la-Belle-Verrière qui vient éblouir Chartres de son bleu en 1180.
Vitrail Notre-Dame-de-la-Belle-Verrières, Cathédrale de chartres
L’an de grâce 1194 voit le feu s’abattre sur la cathédrale de Chartres, rebâtie les vitraux y seront multipliés afin de construire une église de lumière sacrée, incluant la Vie de Charlemagne permettant de renforcer le prestige de la monarchie Royale et son caractère sacré. La cathédrale totalise 172 baies qui donnent une surface de 2 600 m2 de vitraux.
Partie du vitrail de la vie de Charlemagne, Cathédrale de Chartres
Dans le même temps, le reste de la France et la capitale ne sont pas en reste. En effet, l’abbé Suger décide de reconstruire l’abbaye de Saint-Denis, future nécropole royale, en y affichant des vitraux d’une grande beauté de la vie de Saint-Denis ou encore de la Passion du Christ.
N’oublions pas la cathédrale de France Notre-Dame de Paris, dont la construction est initiée par l’Évêque Maurice de Sully, qui offre à Paris des vitraux d’une qualité assez extraordinaire.
Rose nord (XIIIème siècle), Notre-Dame de Paris
Au cours du XIIIème sicèle, le Roi Saint-Louis veut un écrin saint pour les reliques de la Passion du Christ et c’est au sein du Palais de la Cité qu’il fait bâtir la Sainte-Chapelle. Elle est un joyau de l’art gothique, ses vitraux sont merveilleux mais d’un style assez surprenant impliquant des personnages masculins mis en avant et élancés avec des têtes très ronde.
Rosace de l'Apocalypse, Sainte Chapelle
Toujours est-il que le vitrail de cette époque est le moyen de transmettre au fidèle l’histoire et la parole de l’Église Catholique.
Au-delà de ces prouesses architecturales, le vitrail est considéré à cette époque comme un moyen de communication. Après le XIIIème siècle, l’on mettra en avant la beauté, le côté artistique du vitrail : il passera du registre religieux et une décoration somptueuse et promotrice de la richesse de chacun.
Vitrail : une œuvre d’art
Nous ne connaissons pas les maîtres verriers de l’époque gothique mais l’on peut sans conteste les considérer comme des artistes dont les œuvres sont aujourd’hui admirées par des foules ayant trait à la religion ou non, ce spectacle de couleur n’en a pas fini de donner au monde une image moins sombre du moyen-âge.
Vitrail recomposé de l'Hôtel-Dieu de Beaune
Jusqu’à la Révolution de 1789, les commandes de vitraux sont toujours aussi nombreuses avec des thématiques toujours très religieuses ou monarchiques. La Révolution remet en cause la société, la religion et par la même le vitrail qui devient un signe trop ostentatoire …
La monarchie reviendra et signera le retour en grâce du vitrail même si cette pratique semble quelque peu dépassée … Le XIXème siècle, et notamment la période du Second Empire, marque un retour d’intérêt pour le moyen-âge, le gothique comme le prouve le succès de Notre-Dame-de-Paris de Victor Hugo ou les travaux de restauration du château de Pierrefonds par le couple impérial.
Vitrail de la vie de Sainte Geneviève (XIXème siècle), Cloître de Notre-Dame de Paris
A cette époque, c’est un moyen-âge revisité et sans très fantasmé auquel on assiste par la proposition d’Eugène Viollet-le-Duc qui a pour but de faire renaître une pratique magique, fantastique du vitrail et de ses couleurs.
Vitrail XIXème, Notre-Dame de Paris
N’oublions pas également la « mode » du vitrail photographique de cette époque qui commence à faire glisser le vitrail dans l’art décoratif.
Avec l’arrivée des années 1900, le vitrail coloré va se répandre dans les grands magasins parisiens comme les Galeries Lafayette ou les commerces art déco …
L’on pourrait en dire encore beaucoup concernant le vitrail mais terminons avec le XXème siècle et Marc Chagall qui va créer des vitraux qui sont des œuvres d’art extraordinaires remplis de symoblisme, de couleurs qui épousent la lumière, rendez-vous à la cathédrale de Metz pour en découvrir quelques exemples.
Vitrail de la Création (Chagall, 1963), Cathédrale de Metz