La Première Guerre Mondiale, de 1914 à 1918, laisse des ruines partout dans le nord de la France. Soissons ne sera pas épargnée par la destruction. Malgré tout, la ville possède encore quelques merveilles qui nous laissent admirer la grandeur passée de la riche cité royale.
La Cathédrale de Soissons en ruine, Jean Foussier
Le Royaume de Soissons
Aux temps reculés de la Guerre des Gaules, Soissons faisait partie du Royaume des Suessons. Lors de la bataille de l’Aisne, en 57 av. J. C., la victoire des Romains est incontestable et l’on assiste à une transformation de la société. L’ancienne ville de Soissons est laissée comme cité libre et le pouvoir s’en va vers la nouvelle colonie : Augusta Suessionum. La ville est prospère est d’une taille équivalente aux villes de Rouen ou Reims de l’époque.
Alors que les invasions germaniques débutent, Soissons doit se munir de remparts pour se protéger de l’ennemi et la cité décline, du fait de ce repli.
A l’époque romaine, au IIIème siècle, Crépin et Crépinien venant de Rome arrivent à Soissons. Les deux cordonniers sont chrétiens : ils fabriquent des chaussures pour les riches et pour les pauvres, qui eux ne payaient pas. La situation arrive aux oreilles de l’Empereur Maximilien qui leur ordonne d’abjurer leur foi, et, devant leur refus, les fait torturer puis jeter dans une citerne de plomb dont ils sortent indemnes … ils finirent par être décapités. Ils devinrent dès lors des martyrs vénérés par les Églises catholiques et orthodoxes.
Vitrail, Cathédrale Saint-Gervais-et-Saint-Protais, Soissons
L’Empire Romain bien affaiblit par les invasions diverses laisse une plus grande autonomie aux provinces et, de fait, l’Empereur Majorien nomme commandant de la garnison Aegidius. À la mort de l’Empereur, Aegidius conserve ses prérogatives et gouverne la province dès lors connue comme le Royaume de Soissons. Il meurt en 465 et c’est son fils Syagrius qui lui succède.
Soissons et le Royaume des Francs
L’année 486 marque un tournant dans l’histoire de Soissons. Clovis, le Roi des Francs, désire unifier la Gaule sous bannière et va, de fait, écraser les autres royaumes dont le Royaume de Soissons. Ainsi, en vainquant Syagrius, qui s’enfuit à Toulouse, Clovis prend le royaume et la ville perd de son importance. A la suite de cette bataille naîtra l’épisode du « vase de Soissons ».
Clovis établit sa capitale à Paris et la ville poursuit son existence dans les coutumes romaine puis devient une cité épiscopale.
En 511, Clovis décède et son royaume est partagé entre ses fils dont Clotaire Ier qui devient Roi de Neustrie et fait de Soissons sa capitale.
Tête du Roi Clotaire Ier, Abbaye Saint-Médard, Soissons
A cette époque, le fils d’un noble appelé Médard développe des valeurs tournées vers les autres et aurait accompli des miracles, ce qui lui vaut d’être vu comme un saint de son vivant. Il deviendra Évêque du Vermandois et installera son siège à Noyon. Médard décède le 8 juin 558, le Roi Clotaire Ier décide de faire revenir sa dépouille à Soissons, mais le convoi s’arrête sur le lieu qui accueillera plus tard l’Abbaye Saint-Médard dont il ne subsiste que peu à notre époque.
Abbaye Saint-Médard, Soissons
En décembre 561, Clotaire Ier décède et sera inhumé dans la crypte auprès de Saint-Médard, son fils Sigebert l’y rejoindra en 575.
Crypte de l’Abbaye Saint-Médard, Soissons
Deux siècles passent et Soissons revient dans la grande Histoire avec Pépin le Bref. En effet, c’est à Soissons qu’il est élu Roi des Francs en novembre 751. Afin d’assurer son pouvoir, Pépin fait sacrer Roi ses deux fils le 9 octobre 768 : Charles à Noyon et Carloman à Soissons.
Cathédrale Saint-Gervais-et-Saint-Protais, Soissons
Soissons, un patrimoine religieux d’exception
Les clochers sont une composante essentielle de la ville de Soissons. Si la Révolution française et les bombardements de la Première Guerre Mondiale ont amputés la ville de nombre de ce qui y fut bâti, nous conservons la trace de ce que fût la cité au travers des abbayes et de la cathédrale qui nous sont parvenus de par le travail de restauration et d’entretien entrepris.
Pour débuter cette plongée dans le patrimoine religieux de la ville, je vous invite à admirer le plan reliquaire ci-dessous qui permet de voir la prépondérance des abbayes et clochers.
Plan reliquaire, Soissons, XVIème siècle
La cathédrale de Soissons a une riche histoire. En effet, elle aurait été fondée à la fin du IVème siècle et connaîtra nombre de modifications et de réparations. Cette ancienne cathédrale subit les affres du temps mais également mais surtout les « traits enflammés » de l’armée d’Hugues le Grand qui vient assiéger Soissons en 948. L’on peut ainsi dire que l’actuelle cathédrale est la troisième version, sa construction débute en 1176 sous la direction de l’Évêque Nivelon Ier. Rebâtir une cathédrale n’est pas chose aisée, il faut donc rebâtir par petite parties permettant ainsi de continuer les offices. La reconstruction du chœur est donc achevée le 13 mai 1212 comme l’indique sa dédicace.
Dédicace du chœur de la cathédrale de Soissons, 1212
Plus de deux siècles seront nécessaires pour voir la cathédrale achevée, elle est en effet dédicacée le dimanche 25 avril 1479.
La partie la plus ancienne de la cathédrale remonte au XIIème siècle, l’on peut admirer le croisillon sud d’un style gothique primitif, en forme d’hémicycle, composé de quatre niveaux. L’on peut en admirer un autre exemple au sein de la cathédrale de Noyon.
Croisillon sud, XIIème siècle, Cathédrale de Soissons
L’on peut remarquer des similitudes avec la glorieuse cathédrale de Laon. Dans cette optique, l’on remarque au sein de la chapelle basse la très délicate clé de voûte.
Clé de voûte, Cathédrale de Soissons
Parmi les bâtiments d’importance, il se trouvait l’abbaye Notre-Dame de Soissons. Elle fut fondée dans la seconde partie du VIIème siècle par Ébroïn, l’un des maires du palais des rois mérovingiens. L’on conserve de cette époque le tombeau de l’Évêque Draussin qui office à Soissons dans les années 660.
Tombeau de l’Évêque Draussin, copie, Musée Saint-Léger, Soissons
Au moment de la Révolution française, l’abbaye est dissoute et tombe progressivement en ruine.
Grabrielle Marie de La Rochefoucauld, Abesse de Notre-Dame de 1683 à 1693
L’on en conserve aujourd’hui que l’église Saint-Pierre et les quelques ruines attenantes.
Ruines de l'abbaye Notre-Dame de Soissons
L’abbaye de Saint-Léger s’élève toujours à proximité des ruines de l’abbaye Notre-Dame de Soissons. Léodegard ou Léger d’Autun naquit en 616 sur les bords du Rhin dans une famille noble. En 656, il devient le précepteur des enfants du Roi défunt Clovis II. Il sera chargé par la Régente de responsabilités et pourra ainsi faire aboli l’esclavage effectué sur les gaulois. Devenu un personnage trop important dans un royaume instable, il se rend à Ébroïn qui lui fait arracher les yeux, les lèvres et la langue et le fera plus tard assassiner. La sainteté du martyr est établie en 681, une chapelle sera établie pour le culte du Saint. Une abbaye y sera fondée en 1152.
Abbaye Saint-Léger, Soissons
La merveille de Soissons reste l’abbaye Saint-Jean-des-Vignes. Elle est fondée en 1076 par Hugues Le Blanc, seigneur de Château-Thierry. Elle fut l’une des riches abbayes du moyen-âge. La Révolution française viendra chasser les moines de l’abbaye en vendre les biens et en détruire les vitraux. L’édifice restera intact jusqu’à ce que la destruction fût décidée … malgré tout, l’on conserve une partie de ce riche lieu.
Abbaye Saint-Jean-des-Vignes, Soissons
Preuve de la richesse et de la beauté de l’abbaye, le réfectoire du XIIIème siècle nous est parvenu. Il est composé de deux nefs de huit travées, une très ample structure.
Réfectoire, Abbaye Saint-Jean-des-Vignes, Soissons
Malgré les bombardements de la Première Guerre Mondiale, nous pouvons toucher du doigt le patrimoine et donc l’histoire de Soissons. Une histoire que j’ai tenté de vous faire découvrir avec ces quelques lignes et je vous invite à vous rendre sur place pour vous aussi découvrir cette belle cité.
Abbaye Saint-Jean-des-Vignes, Soissons