1939, le IIIème Reich Allemand attaque l’ouest et vise la France. A la « Drôle de Guerre » succède une percée inattendue par l’état-major français. En effet, les Allemands passent par les Ardennes et finissent par encercler les Armées Alliées à Dunkerque. Alors que le Gouvernement de Paul Reynaud jette l’éponge, le Maréchal Pétain demande l’armistice le 17 juin 1940. L’armistice est signé le 22 juin 1940 et la France est divisée en deux dont une moitié occupée par l’ennemi, comprenant la Normandie.
Canon de 150 mm, casemate de la Batterie de Longues-sur-Mer
Le Mur de l’Atlantique
Une année s’est écoulée depuis l’armistice. Le IIIème Reich rompt le pacte germano-soviétique et attaque à l’est, l’URSS. L’offensive ne se déroule pas comme prévu. Staline, dirigeant de l’URSS, demande le soutien des Alliés, avec l’ouverture d’un front à l’ouest. Le haut commandement de la Wehrmacht comprend la nécessité de renforcer le littoral, surtout français. Dès octobre 1941, Hitler ordonne la construction de défenses de l’archipel des îles anglo-normandes. Le 15 mars 1942, Hitler publie la directive de guerre n°40 impliquant le renforcement des zones côtières dans tous les pays occupés ou annexés par le IIIème Reich. Une partie de l’idée est la protection des ports de la façade Atlantique d’où partent les fameux U-Boot, les sous-marins allemands.
Poste de direction de tir, Batterie de Longues-sur-Mer
Il est évident que le Reich ne peut pas concevoir un véritable mur allant de la Norvège à l’Espagne. Il faut donc sécuriser les endroits où des débarquement Alliés pourraient être possibles ainsi que toutes les positions stratégiques. Certains murs seront bâtis mais ce seront surtout des bunkers et des batteries, comme à Longues-sur-Mer.
Le 5 novembre 1943, le Maréchal Erwin Rommel est nommé inspecteur des fortifications de l’ouest puis devient en janvier 1944, le commandant du groupe d’armée B. Rommel est un militaire chevronné qui sait pertinemment que le Mur de l’Atlantique ne sera en aucun cas suffisant pour repousser les Alliés et suppose qu’il faudra mener des combats dans « une zone fortifiée et minée s’étendant sur 8 à 9 kilomètres à l’intérieur des terres défendues en direction à la fois de la mer et de l’intérieur » (citation du rapport du 30 décembre 1943 de Rommel). Malgré tout, il renforce les défenses côtières.
La Batterie de Longues-sur-Mer
L’Organisation Todt est en charge de l’édification de ce Mur de l’Atlantique. A 8 kilomètres de Bayeux, l’on repère un point à mi-chemin entre Arromanches et Port-en-Bessin : un plateau à 65 mètres au-dessus de la mer et à prêt de 500 mètres de la plage.
Vue sur le port artificiel d’Arromanches, Longues-sur-Mer
L’idée est de couvrir le terrain entre les batteries de la Pointe du Hoc et de Ver-sur-Mer.
La batterie sort de terre au début de l’année 1944 pour servir de défenses côtières pour la Kriegsmarine, sous le commandement de la Wehrmacht, sous le code Wn. 48. Les hommes du coin sont réquisitionnés à la tâche et 4 mois plus tard l’ouvrage est achevé. Le mois d’avril 1944 voit arriver les canons. Le 9 mai 1944, le Maréchal Rommel vient inspecter la batterie qui lui fait bonne impression.
Batterie de Longues-sur-Mer
La batterie est de type standard, elle se compose de de ensembles parallèles. En première ligne, on dispose d’un poste de direction de tir (M262), agrémenté de Tobruk 58C, des mortiers de 50 mm et des Flak de 20 mm. En seconde ligne, on installe quatre casemates de type Regelbau M272 équipés de canons de 150 mm, en retrait l’on retrouve des Tobruk ainsi que deux canons de 76,2 mm.
L’ensemble est solide et laisse à penser à une petite forteresse faite pour tenir un siège.
Les blockhaus
Suivant le pays, l’on trouve les appellations de casemates, bunker, blockhaus, qui relèvent toutes d’un système de défense fortifié et de différents types.
Ainsi, à 300 mètres du littoral, il fut construit quatre casemates Regelbau M272. L’Organisation Todt va concevoir nombre de ces ouvrages et l’on va constituer des casemates standardisées pour gagner du temps sur leur construction. La M272 est forte de 16,50 mètres de large pour 12,5 de long. Elle serait constituée de 750 m2 de béton fait avec les matières premières trouvées sur place.
Regelbau M272, Batterie de Longues-sur-Mer
Également dotée d’un canon de marine de 150 mm, la M272 est un élément important de la batterie. Ces canons TK C/36 fabriqués par Skoda avaient une portée d’environ 20 kilomètres.
Canon de 150 mm, Batterie de Longues-sur-Mer
Derrière le canon se trouve deux petites pièces, l’une contenant de la poudre et l’autre faite pour stocker les obus.
Regelbau M272, Batterie de Longues-sur-Mer
Dans ce type d’ouvrage, l’entrée et la sortie des troupes peuvent se faire par l’avant sur les côtés du canon ou par l’arrière, assurant une possibilité de retraite.
Regelbau M272, arrière, Batterie de Longues-sur-Mer
Le poste de direction de tir
300 mètres devant les canons et au bord de la falaise se trouve le poste de direction de tir. Casemate de type Regelbau M262A, il a pour rôle de commander le tir. De fait, cette installation est la plus moderne avec une électrification du système de communication et de direction des tirs. Forte de 720 m3 de béton, elle était composée de 6 soldats.
Regelbau M262A, Batterie de Longues-sur-Mer
Le niveau inférieur se compose d’une salle des cartes, d’une radio, d’une salle de communication et de couchages.
Regelbau M262A, niveau inférieur, Batterie de Longues-sur-Mer
Au niveau supérieur, le soldat équipé de jumelles peut avoir une visibilité à plus de 180° ce qui permet une surveillance sérieuse des éventuels mouvements ennemis. Étant repéré, les coordonnées de l’ennemi sont calculées tout comme les angles de tir par télémètre. L’ordre est transmis aux casemates arrière qui font sur l’ennemi.
Regelbau M262A, niveau supérieur, Batterie de Longues-sur-Mer
Ayant sans doute était bâti tardivement, le poste n’est pas totalement achevé lors du débarquement, ce qui aura peut-être bénéficié aux Alliés.
Les autres défenses
Par ailleurs, en mai 1944, la batterie se trouve renforcée par trois Flaks de 20 mm, un canon antiaérien.
Emplacement de Flak, Batterie de Longues-sur-Mer
Le site est également percé de Tobruk 58c qui sont une petite construction circulaire bétonné ouverte au sommet de 80 cm de diamètre où un soldat devait prendre place. L’idée étant une exposition du soldat limitée à sa tête et ses épaules et se fondant plus dans le terrain. L’intérêt est multiple : il est facile à construire, demande peu de matières premières et constitue une fortification légère pouvant accueillir un soldat ou être modifié pour accueillir autre chose comme un mortier.
Tobrouk, Batterie de Longues-sur-Mer
Le Débarquement
L’opération Overlord est lancée par les Alliés le 6 juin 1944.
Au matin, à 5h30, la batterie se trouve sous le feu du HMS Ajax qui ne fera que des dégâts superficiels. A 6h, la batterie ouvre le feu sur le HMS Bulolo sur le secteur de Gold Beach.
Ce faisant, deux bâtiments de guerre anglais, les HMS Ajax et Argonault font route vers la batterie et tirent 159 fois sur la batterie : 2 canons de 150 mm sont mis hors service.
Regelbau M272, Batterie de Longues-sur-Mer
Au départ des navires anglais, les Allemands réparent ce qui peut l’être et font feu sur Omaha Beach. Les opérations Alliées sont très difficiles dans le secteur d’Omaha et le Croiseur français Georges Leygues passe à l’attaque de la batterie, qui aura tirée 115 fois dans la journée. La batterie est rendue inopérante.
Regelbau M272, Batterie de Longues-sur-Mer
Le 7 juin 1944, les soldats supplémentaires présents sur la batterie sont rappelés à Bayeux. La RAF attaque le site et la batterie sera prise par les Alliés face à des soldats allemands fatigués de se battre. Sur les 180 soldats de la batterie, les 120 hommes « restant » se rendent.
Regelbau M272, Batterie de Longues-sur-Mer
Après la guerre, le site est désaffecté. Il sert de décor au film Le Jour le plus long, sorti en 1962. Le site est classé aux Monument Historiques le 25 octobre 2001.