2000 ans d’histoire et deux monuments inscrits à l’UNESCO (la Cathédrale Notre-Dame et le Beffroi) font de Tournai une cité incontournable du Royaume de Belgique.

Tournai à l’époque romaine
Il est facile à supposer que Tournai fut une bourgade longtemps avant notre ère au vu de sa situation géographique. Néanmoins, la première mention de la ville est dans la Notitia Galliarum qui explicite les provinces et les villes de la Gaule romaine, on y retrouve notamment ciuitas Tornacensis, Tournai.
Par ailleurs, la légende de Saint Piat évoque qu’il aurait été décapité, en 286, permettant de supposer de l’existence de la cité déjà au IIIème siècle de notre ère.
Bien que sans fortifications, il semblerait que la ville de Tournai aurait été importante à l’époque romaine avec son aqueduc, son hypocauste, ses canalisations et des égouts. Les grandes invasions du Vème siècle marquent un tournant dans le destin de la ville : les Vandales la pille en 407 et les Francs en prennent le contrôle.

Tournai, capitale des Francs Saliens
Alors que l’Empire Romain se désagrège, Rome préfère conserver ses troupes et ses forces pour des territoires moins lointains de l’Italie. Clodion le Chevelu va donc signer un traité faisant de la ville de Tournai une cité alliée de Rome mais hors de sa domination. Parti d’au-delà du Rhin, les Francs Saliens vont fonder un royaume dont Tournai sera la capitale. Le second Roi Saliens va laisser son nom à toute une dynastie : Mérovée. Tournai reste le point de départ de la dynastie mérovingienne.

Son fils, le Roi Childéric Ier conserve certainement sa capitale en la bonne ville de Tournai. Il meurt à Tournai en 481, sa tombe fut retrouvée à proximité de l’église Saint-Brice au XVIIème siècle. Childéric avait été longtemps oublié mais la découverte de son caveau et surtout de son trésor va lui redonner la place qu’il mérite dans l’histoire et plus encore ouvrir une fenêtre vers les mérovingiens.


Le Roi Clovis Ier va faire évoluer le destin de Tournai : au fil de ses conquêtes, sa capitale devient Soissons puis Paris. Tournai va donc devenir un siège épiscopal sous la tutelle de Reims, où le Roi sera baptisé. Ainsi donc, la gestion de Tournai sera dévolue à un évêque : Éleuthère de Tournai. Sacré évêque par Saint-Rémi de Reims, Éleuthère affronte une hostilité clairement affichée du fait de l’abandon par une partie de la population de la religion chrétienne. A force de patience, son discours plait à la population qui le rejoint dans le culte, il baptisera nombre d’habitants de Tournai. Malgré tout, le 20 février 531 il fut blessé à la sortie de l’église et mourut quelque temps plus tard dévoué au culte. D’autres évêques se succèderont dans le gouvernement de la ville de Tournai.
En l’an de grâce 511, Clovis meurt. Son royaume est partagé entre ses fils. Clotaire Ier hérite de Tournai, il réussira à réunifier les Francs en un seul royaume en 558. À sa mort, son fils Chilpéric reçoit le petit Royaume de Soissons, comprenant Tournai. Les fils de Clotaire vont malheureusement se déchirer pour prendre les possessions des uns et des autres. Arnould de Nimègue peintre-verrier va fabriquer une série de vitraux pour la cathédrale de Tournai entre 1490 et 1500, il sera aidé dans cette tâche d’Henri de Campes, un peintre-verrier de Tournai. Nimègue va peindre sur verre l’histoire des affrontements entre Chilpéric et Sigebert. 578, la guerre éclate entre les deux frères, Sigebert victorieux va suivre l’armée de Chilpéric, qui s’enfuie.

Alors en déroute, Chilpéric s’enfuit avec quelques guerriers pendant que les chefs militaires de son royaume trahissent en rendant les honneurs à Sigebert. Le Roi Chilpéric va trouver refuge à Tournai, l’évêque est resté fidèle au Roi.

La Reine Frédégonde reçoit deux assassins ayant pour mission de tuer Sigebert. Les assassins parviennent à tuer le Roi Sigebert dans sa tente royale au camp de Vitry en Artois, cet acte brutal marque la victoire de Chilpéric. En récompense de sa loyauté, la ville de Tournai obtient nombre de privilège du Roi Chilpéric.

Avec le traité de Verdun de 843, Tournai se retrouve dans le giron de Charles le Chauve, la Francie Occidentale.
L’âge d’or de Tournai
Baudouin Ier, Comte de Flandre, va pouvoir asseoir son pouvoir sur le Tournaisis, Tournai et sa région. Parallèlement, le Roi de France garde la mainmise sur Tournai. L’activité du drap et de la pierre de Tournai va faire la richesse de la petite cité et lancer une période démographique de forte hausse, en cela Tournai atteint son âge d’or alors qu’elle n’est plus capitale.

Éleuthère de Tournai, l’un des premiers évêques de la ville, fera bâtir au Vème siècle, la première cathédrale.
L’épisode de peste de la fin du XIème siècle n’aura que peu d’effets sur le développement de Tournai qui ne ralentit pas, l’évêque demeure possédant l’autorité de la cité.
À partir du IXème siècle, on édifie une nouvelle cathédrale de style roman. L’évêché de Tournai est officiellement de l’celui de Noyon en 1146. La cathédrale romane est officiellement dédicacée en 1171. Les travaux vont se poursuivre pour aller vers un peu de gothique, le chœur gothique sera donc dédicacé en 1255. Ainsi donc, c’est un vaisseau de 134 mètres de long et s’élevant avec ses cinq tours romanes de 83 mètres de hauts qui dominent la ville, constituant en merveille de la ville.
Grand est le pouvoir de l’Église dans les Flandre alors le Roi de France Philippe-Auguste offre des chartes, en 1211, à Tournai pour s’accorder la loyauté de la cité et mettre à mal le pouvoir ecclésiastique. La cité devient donc vassale du Royaume de France. Tournai est donc la possession française la plus au nord, Philippe-Auguste va donc décider de la construction d’une enceinte solide, dont le Fort Rouge une tour du XIIème siècle en est peut-être un vestige.

Le Roi avait ses raisons. En effet, en 1213, le Comte de Flandre appuyé par les Anglais tente de prendre la ville et finiront par la prendre puis de la reperdre après la victoire française de Bouvines, en 1214.
A nouveau, les troubles n’ont pas véritablement d’impact sur l’économie de la cité qui se porte au mieux : le drap se vend toujours très bien, avec une affiliation à une association commerciale de la mer du nord, la pierre de Tournai se vend toujours plus cher et la musique est représenté par le chant de la Messe de Tournai. A cette même époque, l’église Saint-Jacques se voit assortie d’une nef et d’un chœur dans le style gothique tournaisien ainsi que d’une charpente exceptionnelle du début du XIIème siècle.

L’architecture médiévale du nord nous présente un de ces formidable vestiges : le Pont des Trous. Porte de la ville protégeant l’entrée par l’Escaut et la traversée de la ville. Il est bâti à partir de 1281 et son arche se termine vers 1329. Dans le même temps, le roi de France Philippe IV le Bel envahit le Tournaisis, le territoire autour de Tournai. Le Roi supprime l’autonomie de Tournai en 1332.


La fin du XIVème siècle est marqué par le développement de puissance de Duché de Bourgogne qui devient le maître des Pays-Bas. Tournai reste fidèle à la France et à ses Rois et notamment à Charles VII pendant la période où il fut déshérité de ses droits à la faveurs du Roi d’Angleterre par le traité de Troyes. Tournai s’élève en commune gouverner par les corporations de la ville, le drap et la tapisserie sont toujours florissants. L’époque est au Maitres Flamands et la cité compte plusieurs peintres d’exception : Jacques Daret (naît à Tournai en 1404), Robert Campin (meurt à Tournai en 1444) et surtout Rogier van der Weyden (naît à tournai en 1400), dont la Vierge à l’Enfant détenue par le Musée des Beaux-Arts nous laisse admirer le talent.
Le déclin de Tournai
Au début du XVIème siècle, Tournai est en recul économique. La petite cité française est en première ligne face aux nombreux ennemis de la France. De fait, le Roi Henri VIII d’Angleterre prend la ville en 1513. Il y viendra le 15 septembre 1513 pour recevoir le serment de fidélité de la cité sur la place près du Beffroi sans doute à proximité de la Halle aux Draps.

En 1500, Charles naquit à Gand. À partir de 1507, Marguerite d’Autriche devient Gouverneur des Pays-Bas. Marguerite d’Autriche va prendre en charge son neveu Charles, le futur Empereur Charles Quint, au sein de sa Cour organisée dans son palais de Malines (à 100 kms au nord-est de Tournai). Charles est élu Empereur en 1520 et préféré au Roi de France François Ier, avec lequel il entre en guerre. Charles Quint se tourne logiquement vers l’enclave française dans les Pays-Bas qu’est Tournai. Après un blocus suivi d’un siège, la ville capitule le 3 décembre 1521.


La vieille Europe est soumise aux tourments de la Réforme. Tournai ne fait pas exception aux troubles. Le Gouverneur, Pierre Melun, dû aller marcher sur Gravelines et offre la défense de la ville à son adjoint et à son épouse. En 1581, le Duc de Parme Alexandre Farnèse attaque la ville qu’il croit prendre mais ce fut sans compter sur le courage et l’héroïsme de la Princesse d’Espignoy, la femme du gouverneur qui tiendra la ville autant que possible même si elle finit par se rendre en nombre 1581.

Tournai change à nouveau de nationalité en 1667. Le jeune Roi de France Louis XIV réclame au nom de son épouse une partie des Pays-Bas à la suite de la mort de Philippe IV d’Espagne. La Guerre de Dévolution débute. L’Armée de Turenne envahi les Pays-Bas. Sous les ordres du Roi, Vauban assiège Tournai qui se rend au bout de deux jours, le 21 juin 1667. Louis XIV nourrissant de grandes ambitions pour tournai qu’il voyait comme la grand capitale provinciale représentant son pouvoir dans le nord : les défenses vont être réaménagées, des rues, des ponts, des maisons sont détruites et d’autres rebâties, notamment sur les berges de l’Escaut.
S’en suivi une période assez délicate où la cité échoue dans l’escarcelle de l’Autriche, sous le règne de Marie-Thérèse, période où l’économie retrouve des couleurs avec la bonneterie et la porcelaine de Tournai. La connait une période de revendication dans la ligne de la Révolution Française. L’Autriche déclare la guerre à la France révolutionnaire, ce qui ne lui sera pas favorable. Après Valmy et Jemappes, les force françaises entre à Tournai le 8 novembre 1792. Reprise par les Autrichiens, Tournai est à nouveau française le 3 juillet 1794. À la suite de la défaite finale de Napoléon Ier à Waterloo, en 1815, Tournai intègre les états de Guillaume Ier d’Orange-Nassau, Roi des Pays-Bas.

Tournai, cité du royaume de Belgique
En 1830, le Royaume de Belgique est établi, Tournai intègre ce jeune royaume. Quelques décennies plus tard, en 1890, l’Art Nouveau se développe comme un renouveau global dans les domaines de l’architecture, de l’ameublement, de la sculpture, des bibelots, … De nouvelles matières, telles que le fer et le verre, viennent apporter leur concours à cet art plus géométrique et apporteur de lumière.

Henri Van Cutsem décide de léguer sa collection de peinture belge en faveur de Tournai à son décès, en 1904. Il impose une condition : qu’un musée, un écrin soit bâti pour ses œuvres par son ami Victor Horta, célèbre architecte de l’Art Nouveau. Outre la sécurité, la luminosité, la température de conservation des œuvre sont des problèmes posés pour le musée. Bien que le chantier soit interrompu pendant la première guerre mondiale, le musée est inauguré en 1928.

Les deux guerres mondiales auront un impact sur la ville qui sera occupée tour à tour par les forces en présence. Aujourd’hui, Tournai poursuit son développement, en met en avant son riche passé mais également en se tournant vers l’avenir.
